Les phrases à éviter pour soutenir un malade du cancer : les conseils d’une experte

Publié le 28 avril 2025

Face à la maladie d'un proche, nos tentatives de réconfort peuvent parfois aggraver sa souffrance sans le vouloir. Une spécialiste dévoile les expressions maladroites à bannir et partage des alternatives bienveillantes pour un soutien authentique.

“Reste courageux” ou “ne lâche rien” : comment le vocabulaire guerrier peut alourdir le fardeau

Lorsqu’un proche affronte la maladie, son entourage a souvent recours à des métaphores martiales. Des expressions comme « Tiens bon », « Tu vas vaincre cette épreuve », « Ne perds pas espoir » jaillissent spontanément. Bien que motivantes en apparence, ces formules peuvent paradoxalement créer une tension supplémentaire pour la personne concernée.

« Encourager un patient à se battre revient implicitement à lui suggérer que son rétablissement repose uniquement sur sa détermination ou sa capacité à positiver », analyse Amélie Boukhobza, spécialiste en psychologie clinique. « C’est comparable à exiger d’un naufragé qu’il rame plus fort tout en ignorant les vagues qui le submergent. »

Il faut comprendre qu’une pathologie grave, comme un cancer, ne constitue pas une compétition athlétique. Ce n’est pas un défi que l’on peut décider d’accepter ou de refuser. Certains patients, éreintés par les thérapies, n’ont simplement plus les ressources pour « combattre ». Leur imposer une attitude positive revient à nier leur légitimité à ressentir de l’épuisement, de la détresse ou de l’agacement.

Affirmer que « l’état d’esprit représente la moitié de la guérison » risque même d’engendrer de la culpabilité. Si le malade traverse une période difficile, cela sous-entend qu’il compromettrait lui-même ses chances d’amélioration. Une responsabilité écrasante et totalement injuste.

« Je sais ce que tu ressens » ou « mon oncle a connu ça » : le piège des parallèles

Dans une volonté de soutien, on a parfois tendance à établir des comparaisons : « Je me représente ce que tu endures », « Mon parent a surmonté une situation similaire », « Les traitements sont très efficaces maintenant ».

Si l’élan est généreux, l’effet produit peut s’avérer contre-productif, parfois même douloureux. Chaque parcours médical est singulier, chaque ressenti personnel. Les analogies, même bien intentionnées, risquent de banaliser l’expérience. Quant au fameux « je comprends », il peut paraître présomptueux ou déplacé. « L’intimité d’une souffrance reste par nature incommunicable », précise la psychologue.

En croyant apaiser, on risque d’envoyer le message qu’on relativise la peine ou qu’on esquive la réalité du vécu. Comme si on préférait parler de généralités plutôt que d’entendre ce qui se joue vraiment pour l’individu.

Quelles alternatives privilégier ? L’art de l’accompagnement authentique

Devant la maladie, l’essentiel ne réside pas nécessairement dans le choix des termes. C’est la qualité de présence qui compte. Une attention vraie, sans artifice. Des phrases simples comme : « Tu peux compter sur moi », « Je t’accompagne dans cette épreuve », « Les mots me manquent, mais sache que je suis disponible. »

« L’imperfection d’un silence vaut souvent mieux que la perfection d’un discours maladroit. L’important, c’est de manifester sa disponibilité sans attente, sans conseil non sollicité, sans obligation de performance émotionnelle », développe Amélie Boukhobza.

Un regard attentif, une écoute active, une attention discrète mais régulière… Ces marques de considération ont fréquemment plus de valeur que des encouragements stéréotypés.

Soutenir sans étouffer : l’équilibre délicat

Le soutien ne doit pas virer à l’intrusion ou au paternalisme. Accompagner, c’est honorer les fluctuations émotionnelles de l’autre. C’est reconnaître que certains jours seront sombres, que le besoin de solitude est légitime, tout comme le rejet des poncifs du type « ça va s’arranger ».

Au final, la plus belle preuve de solidarité consiste peut-être à : permettre à l’autre d’être exactement où il en est, sans tentative de redressement moral, sans injonction à la résilience. Car dans bien des cas, une attention silencieuse parle plus fort que mille mots.